Pour une véritable justice fiscale !

A l'Assemblée Nationale
mercredi 10 août 2011 13:18

Depuis quelques semaines maintenant, je reçois en grand nombre des cartes postales pré-écrites de la part d'habitants de ma circonscription. Comme beaucoup d'entre nous, ces Citoyennes et Citoyens s'inquiètent de l'augmentation des impôts, taxes, et prélèvements, ainsi que des dépenses publiques qui ne baissent toujours pas malgré les promesses de Nicolas SARKOZY.

En conséquence, ils me demandent de voter le dernier budget avant les prochaines élections, et "d'agir pour une gestion saine des finances publiques, une réelle baisse des dépenses et une réelle réduction des impôts". En tant qu'élu de la République socialiste et responsable, voici ma réponse :

 

 

"Madame, Monsieur,

 

Vous m’avez récemment fait part de vos inquiétudes au sujet des impôts, des dépenses publiques, et du budget de l’Etat en général. En tant que Citoyennes et Citoyens, nous sommes toutes et tous préoccupés par ces questions. Je me permets donc de vous adresser ma réponse, en commençant par un bref rappel historique de la fiscalité française.

Je n’ai pas ici la prétention de résumer en quelques lignes ce qui a déjà fait l’objet de milliers de pages, mais comme Montesquieu le disait : « Il faut éclairer l’histoire par les lois et les lois par l’histoire ».

En abolissant les privilèges, la Révolution française supprime l’injustice et proclame l’égalité devant l’impôt. La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, base fondamentale de notre République adoptée le 26 août 1789, va graver ce principe dans son article XIII : « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses de l’administration, une contribution commune est indispensable. Elle doit être répartie entre tous les Citoyens, en raison de leurs facultés » (sous entendu : en fonction des moyens de chacun). L’ensemble de notre système fiscal est dès lors sensé être régi par ce principe.

Mais en lisant cela, les plus sceptiques demanderont finalement ce que nous avons à envier à l’Ancien régime ! L’impôt est aujourd’hui considéré comme une contrainte par beaucoup de nos concitoyens, qui ont l’impression que les plus pauvres paient toujours plus au profit des riches. La manière honteuse et injuste dont la droite le perçoit et le redistribue explique ce ressenti. Nicolas Sarkozy et l’UMP pratiquent de façon magistrale l’histoire sélective lorsqu’elle peut leur être bénéfique ! Ils ont vite oublié la base de notre République que constitue la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen.

La droite n’a cessé de faire des cadeaux fiscaux aux plus riches ! Pour l’année 2011, le bouclier fiscal va permettre de rembourser 591 millions à 14 400 bénéficiaires déjà aisés ! En parallèle, la récente réforme de l’ISF permettra aux foyers les plus riches d’économiser chaque année 1,8 milliard d’euros !! Et parmi eux, les 1800 plus grosses fortunes de France, celles dont le patrimoine est supérieur à 16,8 millions d’euros, sont désormais taxées à hauteur de 0,5%, contre 1,8% avant la réforme !!! Comment ne pas s’indigner face à ces cadeaux fiscaux alors que le chef de l’Etat ne cesse de demander aux Français les plus modestes de faire un effort ?

Les entreprises sont aussi soumises à des inégalités de traitement. D’un côté il y a les PMI-PME et les artisans qui paient toujours plus, alors que ce sont indéniablement les véritables créateurs de richesses et d’emplois de la France. D’un autre côté, nous avons les grosses entreprises cotées en bourse, qui réalisent des millions, voire des milliards d’euros de bénéfices sans en redistribuer un centime à leurs salariés, et préférant arroser grassement leurs actionnaires. Rendez-vous compte par exemple que Total, qui a réalisé un chiffre d’affaires de dix milliards d’euros en 2010, ne paie pas un centime d’impôt en France !!!

A ces inégalités s’ajoute une gestion catastrophique du budget de l’Etat. Nicolas Sarkozy a beau mettre en avant les notes des agences spécialisées, la réalité est tout autre. Les fondamentaux de l’économie peuvent en témoigner. Ainsi, depuis 2002, la droite a doublé la dette de la France, passant de 900 à 1800 milliards d’euros ! Rien qu’en une année, elle a gonflé de 110 milliards d’euros !! Cette dette publique représente aujourd’hui plus de 85% du PIB, et attendra les 87% fin 2012 !!! La dégradation du marché du travail ne cesse de croître. En juin, les demandeurs d’emplois étaient plus nombreux de 1,5% par rapport à la même période en 2010, signe que l’activité progresse à un faible rythme.

Je pourrais continuer à évoquer ces mauvais chiffres, cela ne changerait rien. Au contraire, il est temps d’agir ! Elus socialistes, nous rappelons haut et fort à la droite que l’impôt est un devoir individuel qui doit s’établir en fonction des moyens de chacun, et qui s’inscrit dans une démarche collective et solidaire. Cette démarche très simple s’est construite autour d’un des piliers de notre Démocratie : le service public. L’impôt doit en effet permettre de financer l’école de la République, l’accès aux soins et à la culture pour tous, la sécurité de chaque citoyen, une justice dont l’indépendance est respectée, l’accès aux nouvelles technologies même dans les zones rurales les plus isolées, la construction d’infrastructures de transports, sans oublier l’environnement, la recherche, les mesures sociales et de solidarité, la conservation de notre patrimoine, la création d’emplois, etc.

Une alternative est possible et se concrétiserait au travers d’une véritable justice fiscale et d’une meilleure redistribution des richesses. Cela doit passer par un impôt sur le revenu plus progressif, c’est-à-dire qui prend davantage en compte la capacité financière de chacun. Concernant les grosses entreprises cotées en bourse, les revenus du capital, les bonus et les stock-options doivent être soumis au même taux d’impôt que les revenus du travail. Ce n’est actuellement pas le cas. Il est également nécessaire de taxer ces grosses entreprises qui privilégient les dividendes de leurs actionnaires, et encore plus lorsqu’elles pratiquent des licenciements boursiers de masse. Au contraire, nous devons favoriser celles qui réinvestissent intégralement leurs bénéfices.

D’un autre côté, les Français attendent une revalorisation de leur pouvoir d’achat. En effet, il est devenu de plus en plus cher de se chauffer, de s’éclairer, de se déplacer, et plus généralement de consommer. Aussi, pour alléger la facture énergétique de chacun, une partie des superprofits des groupes pétroliers doit être réinvestie dans l’aide à l’isolation, le développement des énergies renouvelables, etc. Les jeunes, les femmes et les retraités ne doivent pas être oubliés : une allocation d’études sous condition de ressources doit être versée aux jeunes étudiants afin de se loger et se soigner. L’égalité salariale homme-femme doit une fois pour toute être respectée, et les entreprises dérogeant à la règle sanctionnées. Enfin pour les retraités, le niveau de vie doit être garanti, notamment en revalorisant les petites retraites.

Toutes ces mesures, le Parti socialiste les proposera en 2012. Je crois en la justice fiscale et en une autre société. Et parce que je crois aussi en la responsabilité et la conscience citoyennes de chacune et chacun d’entre nous, et que c’est en agissant ensemble que nous parviendrons à changer les choses, j’espère que vous adhérerez à ces propositions.

Dans les conditions actuelles, je ne voterai donc pas le prochain budget, j’ai d’ailleurs voté contre tous les budgets de l’ère Sarkozy. Le groupe auquel j’appartiens a régulièrement proposé des lois ou des amendements pour la justice fiscale. L’UMP a systématiquement voté contre.

Espérant avoir répondu de mon mieux à vos questions, et restant à votre entière disposition pour toute précision,

Je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes salutations les meilleures."