L’association Le Lien qui assure la défense des patients victimes d’infections nosocomiales, organise ce mardi 25 novembre à l’Assemblée Nationale un colloque sur la prévention des risques et la sécurité des patients, en partenariat avec le Programme pour la Sécurité des Patients de l’Organisation Mondiale de la Santé.

Hervé Féron, qui avait proposé que cette manifestation se tienne au Palais Bourbon, a accueilli en début de matinée les participants et a introduit les débats en rappelant les enjeux de la lutte contre les infections nosocomiales, responsables chaque année d’un coût humain et financier important. Il a également évoqué les démarches qu’il a engagées auprès du Ministère de la Santé visant à la promotion du cuivre antibactérien dans les établissements hospitaliers français.

Le combat d’Hervé Féron se révèle être terriblement d’actualité et pertinent. En témoigne la remarque de Michel Dumont, président du cluster anti-microbien de Champagne-Ardennes : « nous pensons que H1N1 et que Ebola ne résistent pas au cuivre ».

 

Discours d’introduction d’Hervé Féron :

Merci monsieur le Président, mesdames, messieurs,

 

J’éprouve un véritable honneur aujourd’hui à l’idée d’introduire ce colloque qui réunit, par-delà les frontières, des spécialistes émérites dans le domaine de la santé. Le fait que nous soyons ici réunis prouve que nous sommes tous conscients d’une chose : si la santé est déjà l’affaire de tous, le problème de la sécurité des patients doit aussi le devenir.

 

Je tiens à souligner le remarquable travail accompli par les membres du Lien, cette association qui s’engage depuis près de deux décennies pour l’amélioration de la sécurité et de la qualité des soins. Avec Mme RICHON et M. CERETTI, nous avons eu au cours de ces derniers mois des échanges cordiaux et fructueux, et je les remercie vivement d’avoir été avec l’Organisation Mondiale de la Santé à l’initiative de ce colloque qui, je l’espère, verra naître les prémisses d’une collaboration internationale sur ce sujet qui nous mobilise depuis plusieurs années. 

 

Chaque année dans le monde, des centaines de milliers de personnes subissent des dommages et parfois même décèdent de causes liées aux soins médicaux. Rien qu’en France, 4500 personnes en meurent chaque année, soit autant que par accidents de la route.

 

Il paraît aberrant de penser qu’une personne puisse sortir de l’hôpital en moins bonne santé qu’elle n’y était entrée. C’est malheureusement souvent le cas. En France, 7 % des hospitalisations se compliquent d’une infection nosocomiale, soit environ 750 000 cas sur les quinze millions d’hospitalisations annuelles.

 

Il en résulte un coût humain bien sûr, mais aussi financier pour nos systèmes de sécurité sociale. Les infections nosocomiales généreraient ainsi un surcoût annuel estimé entre 2,4 et 6 milliards d’euros pour notre pays. Par ailleurs, l’existence notoire de risques en milieu hospitalier alimente la peur des patients et de leurs familles vis-à-vis des services de santé. Cette situation participe d’une diminution de la confiance envers le personnel, les professionnels de santé, mais également les institutions nationales, dont je suis l’un des représentants aujourd’hui.

 

Partant de ce constat, la qualité des soins et la sécurité des patients doivent constituer une priorité de santé publique, et nous devons nous doter de moyens de lutte efficace contre les infections nosocomiales. C’était le sens de la réponse que Mme la Ministre de la Santé m’avait faite à l’Assemblée en 2013, alors que je l’interrogeais plus précisément sur l’utilisation du cuivre antibactérien.

 

Je souhaiterais attirer votre attention sur ce point, au vu de l’intérêt particulier que représentent les surfaces de contact ou alliages en cuivre en matière de lutte antibactérienne.


De nombreuses études scientifiques ont été menées en la matière, prouvant notamment que 99% des principales bactéries responsables des infections nosocomiales, même très résistantes aux antibiotiques, meurent en moins de deux heures au contact d’une surface cuivrée.

 

Par ailleurs, l’usage du cuivre permettrait de réduire de plus de 40% l’incidence des infections nosocomiales, comme l’a montré le Professeur Michael Schmidt de l’Université de Caroline du Sud.

 

Des expérimentations in situ menées à travers le monde ont permis de confirmer ces données scientifiques. En France, les Centres Hospitaliers de Rambouillet et d’Amiens se sont équipés d’installations en cuivre. Les résultats de cette expérimentation, récemment dévoilés, ne laissent pas de place au doute. Le cuivre a permis de faire baisser significativement la présence de bactéries au sein du service néo-natalité du CHU d’Amiens, tandis qu’à Rambouillet, le taux d’acquisition de bactéries multi-résistantes par les patients du service de réanimation a diminué pendant toute la durée de l’expérimentation. Dans cette même dynamique, cinq EHPAD de Champagne-Ardenne ont annoncé cette année leur volonté de s’équiper de cuivre, en donnant le coup d’envoi de la plus grande expérimentation menée à ce jour sur le cuivre en établissement de santé.

 

A plusieurs reprises, j’ai interpellé le Ministère de la Santé. J’ai notamment suggéré d’équiper d’éléments en cuivre les services de dix hôpitaux français particulièrement soumis aux infections nosocomiales, pour mener sur trois ans une expérimentation, assortie d’une évaluation sur les résultats obtenus en termes d’effet sur la santé publique mais également sur l’économie de la santé. Tout récemment, j’ai souhaité m’entretenir avec la Ministre de l’urgente nécessité de reconnaître l’efficacité du cuivre antibactérien contre les maladies nosocomiales, pensant que le Projet de Loi de santé publique présenté le 16 octobre dernier en Conseil des Ministres représenterait une occasion parfaite. 

 

Pour nous saisir de cet indispensable outil de santé, je suis persuadé que les directions d’hôpitaux, les institutions techniques et les responsables politiques, partagent une grande responsabilité. Nous ne pouvons nous priver de l’innovation dans le domaine de la sécurité des patients et dans celui de la santé en général. 

 

Je forme avec vous l’espoir que notre message soit entendu par les plus hautes instances nationales, pour qu’à terme chaque citoyen puisse bénéficier de la meilleure protection possible contre les maladies nosocomiales. 

 

Permettez-moi de vous raconter une anecdote. A l’Assemblée nationale, dans l’hémicycle, les députés s’expriment tour à tour dans un micro de couleur rosée, qui est indéniablement en cuivre. Pourquoi, en tant que député, parlerais-je dans un micro en cuivre me protégeant de tout risque de contagion, tandis que la majorité des gens, elle, serait exposée à ce risque ? 

 

Pour finir, je souhaiterais vous lire ces quelques mots, qui m’ont été transmis par la Ministre de la Santé. N’ayant pas pu se libérer, elle a souhaité, de cette façon, témoigner son intérêt pour notre démarche. 

 

« Monsieur le député, cher Hervé Féron,

Madame la présidente du LIEN,  

Mesdames et Messieurs les membres du Conseil d’Administration,

Mesdames et Messieurs,

Chère Claude Rambaud, dont je connais l’engagement historique au sein du Lien et que je suis heureuse de saluer.

 

Je regrette de ne pas pouvoir être présente parmi vous mais je tenais à vous adresser ce message. 

Permettez-moi tout d’abord de souligner l’engagement de l’association Le LIEN, association de défense des patients et des usagers de la santé. Je sais qu’elle œuvre depuis des années, avec conviction et efficacité, pour défendre les victimes d’accidents médicaux et plus particulièrement les victimes d’infections nosocomiales. Elle les représente devant les différentes institutions de santé et autorités administratives pour promouvoir la sécurité des soins et la qualité de la prise en charge

 

Je suis heureuse de la présence parmi vous de représentants de l’organisation mondiale de la santé. L’OMS a fait de la sécurité des patients une de ses priorités avec les campagnes sur l’hygiène des mains, ou encore la sécurité au bloc opératoire. Enfin, l’OMS se mobilise face au défi mondial majeur qu’est l’antibiorésistance. 

Depuis des années, la France est fortement impliquée dans ces actions (lutte contre les infections nosocomiales, combat contre la iatrogénie, promotion du bon usage des médicaments…).

 

La sécurité sanitaire et la qualité des soins sont pour moi des priorités. Ce sont des axes stratégiques sur lesquels mon Ministère est totalement mobilisé. Ma principale préoccupation, c’est que le patient soit l’acteur principal de son parcours de soins. L’ensemble des professionnels de santé doit se coordonner autour des besoins du patient et garantir la qualité et la sécurité de ses soins. Si des évènements indésirables liés aux soins surviennent, ils doivent être rapidement identifiés, efficacement gérés et demain mieux prévenus.


Cette ambition impose de mobiliser tous les acteurs de la santé : les professionnels, les patients, mais aussi les associations et les élus. Les professionnels doivent être toujours mieux formés et informés sur la sécurité des soins. Enfin, nous devons soutenir la recherche et l’innovation. Ce sont les ambitions du Programme national pour la sécurité des patients.


Vous le savez, le programme national de prévention des infections nosocomiales 2009-2013 est arrivé à échéance en décembre 2013 et son évaluation a été réalisée par le Haut Conseil en Santé Publique en 2014. Dans la perspective de l’élaboration du nouveau programme, je soutiendrai des orientations tenant compte du parcours de soins du patient dans sa globalité et impliquant les établissements de santé, les établissements médicaux-sociaux et les médecins de ville. 


Le groupe piloté par le Professeur Brun-Buisson a proposé des axes forts :

Développer la prévention des infections acquises liées aux soins tout au long du parcours de santé, en impliquant les patients et les résidents des établissements

Renforcer la prévention et la maitrise de l’antibiorésistance dans l’ensemble des secteurs de l’offre de soins, c’est une priorité nationale. 

Réduire les risques infectieux associés aux actes invasifs. 


Ce nouveau programme n’est pas encore figé, il aboutira à sa forme finalisée d’ici la fin de l’année. Nous souhaitons qu’il soit pérenne et que les professionnels des trois secteurs couverts (sanitaire, ambulatoire et médico-social) se l’approprient. Je souhaite aussi une mise en cohérence des programmes et plans existants : programme national de prévention des infections, plan national d’alerte sur les  antibiotiques et programme national de sécurité du patient.

La stratégie nationale de santé nous donne un cadre d’action pour les années à venir. J’ai annoncé dans le projet de loi relatif à la santé, une réforme des agences avec la création d’un grand institut de santé publique ayant une approche globale des enjeux de veille et de prévention sanitaire. Nous allons par ailleurs réorganiser le dispositif des vigilances en nous appuyant sur les recommandations des rapports de Jean Yves Grall. 


Ces dispositions que je défendrai prochainement devant le parlement permettront de renforcer encore la sécurité sanitaire, de promouvoir la sécurité de tous et la qualité des soins. Je sais que vous y êtes très attachés ; et moi aussi.

Je vous souhaite des échanges fructueux. »

    

Je vous remercie pour votre attention, et vous souhaite un excellent colloque.