Lettre d’André Laignel, Premier Vice-Président de l’Association des Maires de France.
Chers amis,
La publication vendredi du rapport de la Cour des comptes, prévue de longue date, intervient opportunément au lendemain d’une opération de communication bien orchestrée par le Gouvernement. La veille se tenait un nouveau comité d’alerte, sans parler des réunions de la conférence financière des territoires qui se sont étalées sur les dernières semaines. Ce n’est pas anodin : il s’agit évidemment d’imposer une lecture biaisée de la situation dans le but de préparer les esprits à de nouvelles contraintes sur les finances locales. Car il n’a jamais été question de négociation, l’exécutif n’ayant jamais dévoilé ses intentions au cours de ces heures de réunions chronophages.
Pour autant, quand on prend la peine d’y voir un peu plus loin que les raccourcis médiatiques, le rapport de la Cour confirme ce qu’avait déjà montré le rapport de l’observatoire des finances locales :
- Les collectivités subissent un effet ciseaux du fait de recettes qui stagnent et de dépenses qui augmentent sous l’effet de causes qui leur échappent. La hausse de nos dépenses de fonctionnement est principalement due à des décisions de l’Etat qui pèsent sur la masse salariale (point d’indice, mesures catégorielles ou CNRACL) ou conséquences de la hausse de l’inflation ces dernières années qui continue de peser sur le coût de nos marchés de travaux ou sur nos factures d’électricité. Sans parler des transferts de charge insidieux comme sur la sécurité ou la petite enfance.
- L’investissement ne se maintient que grâce à une ponction dans la trésorerie et un accroissement de la dette, confirmant que la tendance n’est pas tenable sur le long terme. C’est donc le soutien à l’économie de proximité et le financement de la transition écologique qui sont menacés. La France risque la récession dès l’année prochaine si le Gouvernement persiste à entraver leur capacité d’investissement.
Au-delà de la contradiction entre ses constats et ses préconisations, le problème de ce nouveau rapport de la Cour est qu’il confond encore une fois photographie et film. Car il apparaît bel et bien que la trajectoire est inquiétante et justifierait de renoncer à toute nouvelle contrainte, normative comme financière.
Ce n’est malheureusement pas la tendance : malgré les affirmations du Gouvernement, les 3 Mds de gel sur les dépenses de l’État annoncés vendredi auront évidemment des conséquences sur les collectivités. A titre d’illustration, le gel de 5 milliards de crédits intervenu en avril avait raboté le fonds vert (- 63 M €), la cohésion des territoires (-71 M €) et la politique du sport ( – 29 M € pour les équipements sportifs et le pass’sport). Nous devons nous attendre au gel des crédits de plusieurs politiques que nous avons pour tâche de mener.
La plus grande vigilance est donc de mise avant les annonces du Premier Ministre qui devraient intervenir autour du 15 juillet, et dont l’objectif est toujours de trouver 40 milliards d’économies…
Bien à vous,
André Laignel