Un nom a toujours un sens, il n’y a pas de mots par hasard, il ne peut donc pas y avoir de tirage au sort.
La méthode est étonnante : demander à des gens tirés au sort de proposer un nom. Comme s’il y avait refus de prise de responsabilité ? Ou bien comme s’il s’agissait de légitimer un possible mauvais choix à venir…
Et puis après, il sera proposé de faire voter par internet, avec tous les risques de manipulations, d’excentricité, ou d’erreurs, que cela permet…
D’autant plus qu’en ayant déjà verrouillé la proposition par le choix de ces « tirés au sort », on s’empêche quasiment de recevoir une proposition nouvelle et pertinente.
Etrange conception de la démocratie… Manque de sérieux ? Démagogie ? Cela fait un peu sondage de bistrot…
Que cherchent-ils ? Veulent-ils faire croire qu’ils seraient plus démocrates que tous les autres ?
Quand on connait les méthodes de la Conseillère Régionale qui porte très médiatiquement tout ça, cela prête à sourire.
Trois possibilités s’offrent donc désormais à vous chers internautes : Acalie, Rhin-Champagne et Nouvelle Austrasie !
Il aurait été intéressant a priori de se poser quelques questions : que cherche-t-on ? Faire un coup médiatique, on a compris.
Mais plus sérieusement, par le nom de la nouvelle région on aurait pu intellectuellement viser une cible : définir une identité ? Un territoire ? Un projet ? Une histoire commune ?
Il me semble qu’aucune des trois propositions ne définit de près ou de loin une de ces quatre cibles.
– Acalie : il s’agit d’un néologisme issu, lui-même, d’un acronyme. On est certainement dans le pire en termes d’esthétisme, mais surtout, ça n’évoque rien de ces quatre cibles, sauf à faire une véritable enquête pour en trouver un minimum de sens. Le temps de l’enquête, le voyageur aura changé de région…
– Rhin-Champagne : cela évoque deux parties de deux morceaux de cette Grande Région. Même si on sent bien qu’il y a eu là la volonté de définir un territoire (de l’est à l’ouest), ça reste pauvre, à peu près, morcelé, fracturé. Comment voudriez-vous que les Ardennais ou les Lorrains s’y retrouvent ? C’est d’emblée abandonner l’idée de réunir. Mais la majorité de cette nouvelle région souhaite-t-elle l’équilibre du territoire ? La cohérence ? Ou bien est-on d’emblée engagé dans une lutte de tous les instants, entre les anciennes régions, les plus grandes villes, l’urbain et le rural ? Malheur aux faibles ! Adieu la République Une et Indivisible !
– La Nouvelle Austrasie : c’est passéiste, ça évoque un territoire qui n’est pas celui dont on parle aujourd’hui. Outre la Lorraine, l’Alsace et la Champagne, l’Austrasie des Mérovingiens comprenait aussi la Belgique, la Rhénanie, et la partie septentrionale des actuels Pays-Bas. Pour définir un territoire, même en le qualifiant de nouveau, on a vu mieux et plus précis !
Et puis, il faut savoir raison garder ! Notre nouvelle grande Région est une réunion, la réunion de trois anciennes régions. Alors que l’Austrasie était, elle, issue du partage du royaume des Francs, donc d’une division.
L’Austrasie était un royaume chrétien.
Alors que nous sommes toujours dans une République laïque, me semble-t-il ?
Et puis « Austrasie », moi ça me fait penser à « ostracisme » donc à l’exclusion, à l’éviction, au rejet. On parle d’ostracisme social, d’ostracisme religieux, d’ostracisme au travail, par exemple…
ça ne donne pas vraiment envie de devenir « néo-austrasien » !!!
Bref, je trouve que ces trois propositions sont malheureuses. Je redoute que l’une d’entre elles (ou peut-être les trois) n’intéresse la majorité de la nouvelle Grande Région. C’est pourquoi je m’inquiète de la méthode utilisée (très induite) pour interroger les citoyens et des possibilités de manipulation ou d’interprétation des résultats.
Un nom a toujours du sens et ce nom pèsera, comme tout nom, sur notre identité et sur l’histoire commune que nous aurons à construire.
Je suis contre ces trois propositions, mais on peut espérer qu’une proposition plus intéressante émergera suffisamment massivement pour peser dans la décision ?
Aujourd’hui, j’ai l’impression qu’il est déjà entré dans l’usage d’appeler cette Grande Région « Grand Est ». Je pense que c’est là une proposition plus intéressante. Parce qu’elle est déjà dans l’usage, spontanément, et que je crois dans le bon sens populaire (loin du tirage au sort).
Parce que « Grand Est » évoque une situation géographique, mais aussi un territoire pas restrictif. Et parce que dans l’expression « Grand Est », j’entends une déclaration d’intention, peut-être même le début d’un projet de développement et d’ouverture vers les territoires environnants.
Et si on faisait la Région ensemble ?