Monsieur le Président,
Nous sommes réunis aujourd’hui pour débattre de nos orientations pour le premier Budget de la Métropole. L’an dernier, ici même, nous avions exprimé notre volonté de mettre en place des nouvelles organisations, un nouveau mode de gouvernance, une nouvelle culture du faire ensemble. Aujourd’hui, alors que nous arrivons à mi-mandat, force est de constater que les améliorations annoncées ne se traduisent pas encore suffisamment dans les actes. Nous avions pu travailler ensemble sur la stratégie économique, débat sur lequel notre groupe avait pu apporter des contributions essentielles. Ce travail constructif dont le Grand Nancy est sorti gagnant sera certainement évoqué tout à l’heure quand nous aborderons l’élaboration du Schéma Régional de Développement Economique d’Internationalisation et d’Innovation.
Mais il est dommage que cette expérience n’ait pas été poursuivie à l’occasion de ce débat d’orientation budgétaire. Profitant du passage de la Communauté Urbaine en Métropole vous avez quasiment dissout la conférence des Maires qui était déjà une instance qui ne fonctionnait pas démocratiquement. Vous l’avez remplacée par un comité exécutif que vous appelez Comex. Ceux qui y participent sont convoqués par vos services à une réunion hebdomadaire où la concertation, la participation à l’élaboration du dossier réelles sont inexistantes. Il ne s’agit que d’informations verticales distillées uniquement par quelques
vice-présidents de droite. Vous avez ainsi verrouillé toute possibilité d’imagination ou de proposition innovante et pertinente sur les Politiques Publiques du Grand Nancy. Je trouve ce Comex parfaitement inintéressant, et tant qu’il en sera ainsi, je n’y participerais pas. C’est d’une autre façon de gouverner dont nous avons besoin, c’est d’une autre façon de gouverner que nous avons convenu.
Je le dis chaque année mais cette réalité me contraint à la répétition : une nouvelle fois nous sommes amenés à nous positionner sur un texte auquel nous n’avons pas suffisamment participé. C’est regrettable car nos propositions auraient certainement pu contribuer à enrichir ce texte et à en renforcer la légitimité. Au contraire, je ne partage ni la description du contexte budgétaire du Grand Nancy, ni le scenario d’équilibre axé sur les économies de gestion.
Comme chaque année depuis 2012, vous rappelez le contexte national difficile et la baisse des dotations de l’État qui pèsent lourd dans le budget et obligent à des ajustements douloureux : – 12,8 % de Dotation Globale de Fonctionnement pour le Grand Nancy en 2016, et près de 16,2 millions d’euros de recettes en moins en cumulé par rapport à 2013. Heureusement, vous reconnaissez quand même au fil des pages de ce rapport que la baisse des dotations de l’Etat est inférieure de 3 millions d’euros à ce qui a été envisagé dans les scenarii précédents et que la réduction de la DGF serait de 3,5 millions d’euros au lieu de 7 millions. Ce n’est d’ailleurs pas loin de ce que j’affirmais l’an dernier alors que vous aviez balayé mon analyse.
Pour réaliser un réel diagnostic financier, il serait plus juste de considérer une période plus longue, qui montrerait bien qu’il est stérile de tenter de montrer du doigt le gouvernement de François Hollande puisque les baisses de dotation de fonctionnement ont commencé en 2008 sous Nicolas Sarkozy.
Nous pourrions également nous interroger sur la cohérence entre les propos critiques formulés ici sur les baisses des crédits alloués aux collectivités et les soutiens affichés à l’échelon national aux différentes politiques de rigueur annoncées qui semblent parfois mépriser l’existence même de la fonction publique…
Alors on peut débattre de la méthode employée par ces gouvernements, de l’ampleur de l’effort demandé aux collectivités, du calendrier notamment par rapport à la revalorisation des valeurs locatives servant de base aux impositions directes locales. Nous nous sommes tous élevés pour dénoncer des baisses de dotations trop rapides, trop drastiques, qui laissent les communes exsangues. Mais si l’on ne considère que ces baisses de dotation de fonctionnement, la Métropole devrait pouvoir faire face comme le font les autres collectivités, et notamment les métropoles. Si le contexte est difficile comme le décrit ce rapport d’orientation budgétaire, pourquoi conserver les mêmes méthodes, les mêmes habitudes ? Nous constatons encore cette année un simple rafistolage, un travail de dentellière rognant sur des dépenses pourtant essentielles, là où des choix plus drastiques s’imposaient. Certes, nous en convenons, il est souvent nécessaire de dégager des économies en faisant des efforts sur certaines lignes de fonctionnement car le maintien de l’investissement est prioritaire. Mais, pour investir, vous vous êtes trop endetté et le remboursement de la dette pèse énormément sur les dépenses de fonctionnement pour ce qui concerne les intérêts. Il faut également conforter notre capacité à rembourser la dette. Le Grand Nancy a mal investi et aujourd’hui nous payons la dette qui devrait dépasser les 705 millions d’euros en 2017, contre 690 millions en 2016. La somme record est donc battue avec un endettement par habitant d’environ 2770 € par habitant selon nos calculs. La capacité de désendettement serait également en hausse avec 10,8 ans au 1er janvier 2017. Le Grand Nancy flirte donc toujours avec les zones dangereuses définies nationalement par les spécialistes. Vous affirmerez que les prévisions pour 2020 sont plus positives avec un retour sous la barre des 700 millions d’euros d’endettement. Je l’espère sincèrement mais cela se fera dans un contexte où certains grands investissements tels que la ligne 2 de transports, le Centre des Congrès et certaines tranches d’ARTEM sont achevés ou le seront en 2020. Les autorisations de programme pour la période 2016-2018 le montrent : nous sommes là quelque part dans une période d’attente et d’économies forcées avant les grands investissements qui s’annoncent, notamment pour la ligne 1 du réseau Stan.
Sur ce point, je souhaite vous exprimer nos craintes vis-à-vis de la confirmation des options prises par ce débat d’orientation budgétaire. Vous écrivez, je cite : « on peut relever le poids prégnant des transports urbains et des ordures ménagères, dépenses sur lesquelles sont concentrées les efforts d’optimisation de gestion ». Vous proposez également de façon explicite des nouvelles optimisations du réseau STAN sur la durée restante du contrat actuel et un nouvel examen de la grille tarifaire. En clair, vous souhaitez à nouveau baisser les fréquences de passage et augmenter les tarifs. De mauvais augure pour préparer le renouvellement de la délégation de service public en 2018. Nous le rappelons : les transports et les ordures ménagères ne peuvent pas être les variables d’ajustement des équilibres budgétaires métropolitains et les entreprises délégataires de service public ne doivent plus être prises pour les boucs émissaires des erreurs passées du Grand Nancy en matière de déplacements. Nous avons pu le constater lors de cette grève du week-end dernier : les habitants, les commerçants, les usagers du Grand Nancy mécontents ne sont pas dupes. Ils savent que les décisions se prennent ici-même, au sein de cette assemblée. Et ces décisions, avec les élus du groupe de Gauche, nous nous y opposons puisque, je le rappelle, nous avions voté contre la diminution des fréquences de passage des bus.
Nous demandons également depuis plusieurs années que soit conduit un véritable audit du réseau de transport en commun afin d’élaborer ensemble un nouveau Plan de Déplacements Urbains cohérent, en partant d’une analyse des besoins et en associant les usagers. Les grands nancéiens vous demandent tout simplement de pouvoir se déplacer à moindre frais. Comme pour la bétonisation programmée de la place Thiers que nous évoquerons tout à l’heure, c’est l’inverse qui est proposé. Vos réorganisations représentent un véritable démantèlement en règle d’un service public au service des citoyens et en particuliers des plus démunis, ceux qui vivent en périphérie et n’ont pas d’autre choix que d’utiliser les transports en commun pour se déplacer. Cette dégradation organisée du réseau de bus n’a qu’un but : dissuader les usagers déboussolés par les diminutions de fréquence et le changement des horaires d’avoir recours aux transports en commun, afin de pouvoir constater un faible taux de remplissage des bus qui justifiera de nouvelles diminutions de fréquences. Les associations ont bien raison de parler de « cercle vicieux ».
Nous sommes également sceptiques mais nous vous proposons de travailler ensemble de façon constructive sur la « réinterrogation de l’offre de services du pôle aquatique » que vous proposez dans le contexte du projet Grand Nancy Thermal. En clair, ce sont des fermetures et des hausses de tarifs pour les piscines qui semblent se profiler. Outre la réflexion sur les piscines qui est ici proposée, il nous semble aujourd’hui important d’accélérer les réflexions sur la faisabilité de la construction concertée d’une nouvelle patinoire mais également d’étudier une solution provisoire qui doit être effective dès la fermeture programmée de la patinoire du Parc des Expositions en septembre 2017 afin de permettre la pérennité de l’activité de patinage SUR L’AGGLOMERATION ET PAS AILLEURS.
Face à la situation budgétaire du Grand Nancy, vouloir maintenir le niveau des investissements et réduire certaines dépenses de gestion ne suffit pas. Il s’agit aujourd’hui d’investir mieux, de contrôler davantage l’utilisation des fonds publics et d’être plus exigeants dans la sélection des projets.
Pour cela, je le répète, les élus que nous sommes ne doivent plus être réduits à l’état de simples gestionnaires, tels des notaires pour ne plus décrédibiliser la parole publique.
Le passage en Métropole s’est accompagné de nouvelles compétences, comme par exemple le transfert des voiries départementales, comme nous le verrons tout à l’heure. Or les voiries dans le Grand Nancy se dégradent.
Sur trois ans, de 2016 à 2018, moins de 25 millions d’euros seront inscrits pour les opérations sur les voiries secondaires pour l’ensemble des 20 communes du Grand Nancy. D’ailleurs, la décision modificative du Budget 2016 qui sera présentée après ce Débat d’Orientation Budgétaire prouve que l’enveloppe prévue pour l’année 2016 était insuffisante pour répondre aux programmations retenues par les communes. Comme je l’avais souvent rappelé.
Enfin, pour des raisons évidentes de sécurité, l’éclairage public ne doit pas non plus représenter une variable d’ajustement budgétaire, tant en investissement qu’en fonctionnement. Les rues du Grand Nancy doivent être correctement éclairées, et pas uniquement pour les fêtes de fin d’année. Et sur le Boulevard du Millénaire, en traversée de Vandoeuvre, Nancy, Jarville et Tomblaine, plongé dans le noir depuis 7 mois, je ne crois pas à l’explication d’une panne qui nécessiterait plusieurs mois d’intervention pour réparation.
Nous pourrions également évoquer la nécessité de développer des économies d’échelle par le renforcement de collaborations intelligentes avec les collectivités voisines, du développement du très haut débit internet indispensable au sein de toute l’agglomération et de bien d’autres sujets. Monsieur le Président, malheureusement les communes sont devenues vos variables d’ajustement budgétaire, la Communauté Urbaine devenue Métropole a progressivement pris des compétences aux communes, ce qui vous a permis d’une part de lever l’impôt pour assumer ces compétences, d’autre part de bénéficier de dotations de l’État pour exercer ces compétences. Mais, lorsque les dotations de l’Etat baissent, vous continuez dans vos erreurs stratégiques, vous vous obstinez dans les mauvais choix à engager des dépenses inutiles. Et vous compensez alors par des économies générées au détriment des communes. C’est la vie des gens au quotidien qui est touchée, cela se concrétise par l’appauvrissement du Service Public (ramassage des ordures ménagères, transport en commun, état des voieries secondaires, …) par une carence en termes d’infrastructures (piscines, patinoires, …) et les conséquences qui se déclinent ensuite sur la fermeture de commerces, sur la sécurité par exemple. Non, les communes et le quotidien des habitants ne doivent pas être des variables d’ajustement budgétaire. Si on ajoute à cela que vous empêchez l’initiative des Maires qui auraient pourtant légitimité à faire vivre des approches territoriales locales pour une cohésion sociale et un développement harmonieux de leur territoire, on constate l’impossibilité pour ces Maires de développer le logement social de façon équilibré sur leur territoire. On constate une anarchie complète dans l’accueil des gens du voyage, on constate une inégalité de traitement d’une commune à l’autre. Aujourd’hui, si un Maire a une bonne idée sur sa commune, 95% des fois cela est empêché par la majorité du Grand Nancy. Et dans le cas où cela serait possible, cela passe par une autorisation comme s’il pouvait y avoir une hiérarchie, le projet est alors détourné et aboutit rarement de façon satisfaisante. Le gel des terrains que vous avez fait réserver par l’EPFL, vous donne le pouvoir de décider tout seul ou à quelques-uns dans votre bureau de la vie des habitants dans nos communes.
Je conclue uniquement en rappelant que la Métropole est une opportunité extraordinaire pour le Grand Nancy, qui nécessite qu’on ne néglige aucune contribution. Nous avons déjà dit que nous sommes prêts à faire Métropole ensemble, nous continuerons à formuler des propositions dans l’intérêt général, et nous espérons que nous serons bientôt entendus.
Je vous remercie.