Après La Provence qui présentait à la Une les jeunes de Tomblaine, un autre journal s’est intéressé à d’autres jeunes de Tomblaine cette semaine, le journal algérien Elwatan, dans un très long article.
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Chantier écologique à Béjaïa : Green Bridge, un pont vert sur Gouraya
Nous ne sommes pas en France, mais bien à Béjaïa, dans le parc de Gouraya (PNG) où, du 15 au 25 juillet, s’est déroulé le projet Green Bridge (Pont vert), un chantier écologique né d’un rapprochement entre deux villes, Béjaïa et la ville française de Tomblaine, dans le département de Meurthe-et-Moselle.
Sur proposition du maire de cette ville, Hervé Feron, et en un commun accord avec le président de l’Association nationale d’échanges entre jeunes (ANEJ), Ali Sahel, l’idée de recevoir à Béjaïa dix jeunes, filles et garçons, de la mairie de Tomblaine et leurs deux accompagnatrices a été retenue.
«Aussitôt, nous avons entamé tous les préparatifs et mis en place tous les moyens nécessaires pour permettre à cet échange qu’on a nommé Green Bridge (le Pont vert) d’avoir lieu. Le pont symbolise les échanges et les relations entre les deux pays et le vert la protection de l’environnement.
L’objectif est de mettre en contact les jeunes des deux villes, échanger des idées et les méthodes de recyclage pour la préservation de l’environnement et promouvoir le potentiel touristique de Béjaïa», nous explique d’entrée Hicham, président du bureau de Béjaïa de l’ANEJ.
Un petit paradis, mais…
Pour le cinquième jour de cette aventure éco-touristique, c’est l’enchanteur Pic des Singes, sis à quelques dizaines de mètres en aval du Fort de Gouraya, qui a été choisi pour la poursuite de cette louable campagne de nettoyage-sensibilisation.
Il fait une chaleur infernale, mais il en faut plus pour décourager l’équipe réconfortée certainement par la beauté ensorceleuse des lieux et les salves sporadiques de brise qui arrivent tout droit de la mer et assèchent les fronts. Véritable coin de paradis, où la nature vous ouvre grands les bras, le Pic des Singes culmine à plus de 340 m d’altitude, offrant ainsi une vue imprenable sur la mer et le Cap Carbon et son phare naturel comptant, à ce qu’on dit, parmi les plus hauts du monde.
Le Pic sert d’abri pour le singe magot, d’où d’ailleurs l’appellation de Pic des Singes, ainsi qu’à quelque 80 autres espèces sauvages. Il est partie intégrante du PNG, comme le sont aussi la Baie des Aiguades, le Fort Gouraya, la Pointe des Salines, le Cap Bouak et des sites historiques, dont la Muraille des Hammadites ou le Fort Lemercier.
C’est ce que prend plaisir à nous détailler Mme Benmamar, employée au PNG, qui n’a pas lâché d’une semelle l’équipe de Green Bridge, à qui elle sert de guide : «Même si c’est le plus petit des 11 parcs nationaux existants en Algérie, avec ses 2080 m², il en reste pas moins que le PNG est le plus riche en biodiversité, en abritant pas moins de 87 espèces protégées, entre mammifères, insectes, oiseaux et autres. Il a été créé en 1984 et depuis 2004, il est classé comme réserve de biosphère, fort qu’il est de ses trois écosystèmes, lacustre, terrestre et marin.»
Malheureusement, même ces trésors patrimoniaux et naturels ne sont pas épargnés par l’incivisme. Outre la multitude d’agressions qu’ils subissent, ils sont frappés dans leur beauté par le fléau récalcitrant de la pollution. Sur les sentiers, dans les parkings, sous les buissons, des tas de saletés et de cadavres de boissons enlaidissent le paysage. Pour y remédier, Mme Benmamar indique que la politique de sensibilisation adoptée par le PNG s’adresse en premier lieu aux plus petits : «A l’instar de ce que je fais maintenant, nous accompagnons les associations dans leurs activités.
Et ce faisant, nous ciblons particulièrement les petits, pour inculquer l’éco-responsabilité aux générations montantes.» Safia Iheddadène, animatrice culturelle franco-algérienne à la mairie de Tomblaine, n’en pense pas moins : «Notre maire, Hervé Feron, est engagé et est très sensible à la question environnementale.
C’est dans cet esprit qu’il a trouvé pertinent d’envoyer un groupe d’enfants de notre mairie pour découvrir un autre mode de vie, échanger, mais le plus intéressant, c’est de les initier à la cause environnementale à travers ce chantier écologique engagé entre Béjaïa et Tomblaine.» Tout en remplissant son sac de détritus et en invitant ses petits «protégés» à faire de même. A deux, en petits groupes ou en solitaire, l’équipe se disperse et se lance à l’affût du moindre détritus. Pour joindre l’utile à l’agréable, certains en profitent pour immortaliser le moment par portable et appareil photo, d’autres se contentent tout simplement d’admirer le paysage.
Protection de l’environnement, une affaire de tous
Il est presque midi. C’est l’heure des braves. Eparpillée le long du sentier du Pic, l’équipe est rappelée à se regrouper pour une pause-déjeuner. Les sacs de déchets sont entassés dans un coin pour être récupérés par les employés municipaux. Profitant de cette pause et de la présence de quelques touristes, Celia, étudiante à l’université de Béjaïa, distribue quelques flyers de sensibilisation.
A l’ombre d’un sapin, nos écolos prennent place pour déguster de bons chappatis et des rafraîchissements réparateurs, tout juste sortis de la voiture d’Arezki, jeune adhérent de l’ANEJ, affectueusement surnommé le Factotum pour son esprit d’initiative débordant. Naturellement, c’est le sujet écologique qui accompagne cette pause-déjeuner, outre l’aspect interculturel et relationnel de l’échange entre les deux régions. Sophie, l’autre accompagnatrice des jeunes Français, défère son déjeuner pour après et profite de cet éphémère regroupement pour parler écologie. Visiblement au fait de la chose environnementale, pour cette animatrice culturelle à la mairie de Tomblaine avec Safia, la protection de l’environnement est avant tout une affaire d’éducation.
«Chez nous, l’éducation à la protection de l’environnement commence dès la maternelle. Petits, les enfants sont initiés au tri des déchets, le recyclage, et en grandissant, ça devient une habitude et ça rentre dans le quotidien sans s’en rendre compte», explique Sophie. Lui emboîtant le pas, Mokrane, étudiant, pointe du doigt le manque de volonté des autorités afin de solutionner le problème de pollution : «Même avec des moyens dérisoires, le monde associatif honore sa part de responsabilité. Reste aux autorités d’accroître les efforts envers l’environnement. Regarder ce parc, il n’y a même pas de poubelles où jeter ses ordures. Les animaux qui y vivent ne sont même pas vaccinés et protégés.» C’est ce que regrette Hicham : «Sans les autorités, nous ne pouvons pas faire grand-chose.
C’est avec les moyens qu’elles peuvent apporter une solution à la problématique de l’environnement, notamment grâce aux moyens qu’elle peut mettre pour la sensibilisation des citoyens. Ce n’est pas le cas malheureusement. Or, l’environnement et la promotion du tourisme sont l’affaire et l’implication de tout le monde. Préserver notre environnement et nos sites, c’est contribuer à promouvoir notre potentiel touristique.»
Selon Hicham, seuls Cevital, le groupe agroalimentaire d’Issad Rebrab, et l’APC de Timezrit ont appuyé cette initiative. Qu’à cela ne tienne, Hicham est persuadé que des initiatives comme Green Bridge sont d’un apport certain pour l’environnement. «Pour nous, notre mission est accomplie doublement. D’un côté, voir des jeunes Français nettoyer ici est un message fort, à la fois pour la population et les autorités. De l’autre, nos invités sont satisfaits de cette expérience et certains disent même qu’ils sont tentés de revenir. Voilà notre objectif», se félicite-t-il. Il est midi passé. Après une matinée bien chargée, embarquement à destination de la plage Saket pour une baignade jusqu’au soir bien méritée.
Amandine, en tandem avec sa compatriote Katia, sac-poubelle à la main, grappille par-ci, par-là, des déchets abandonnés par des visiteurs indélicats sur le sentier du Pic des Singes.
«Peut-être pas autant qu’ici, mais même chez nous il y en a qui jettent leurs déchets dans la nature», nous dit gentiment Amandine, 15 ans, visiblement pour ne pas trop nous froisser. Katia, 14 ans, avec un hochement de tête doublé d’un rictus courtois, nous fait comprendre qu’elle est du même avis.