Monsieur le Président, je vous fais une lettre, que vous lirez peut-être… si vous avez le temps.
Ce dernier soir de l’année, vous vous adresserez aux Français à la télévision. En fait vous vous adresserez surtout à la caméra, avec ou sans prompteur, mais dans un monologue, monocorde, monotone, si formaté qu’on le connait par avance. Votre Cour vous flattera sans doute, les commentateurs et les experts de tous poils disserteront bien sûr. Mais en réalité vous serez bien seul, pathétique, dans les ors de la République face à cette caméra.
Comme des millions de Français, j’éteindrai ma télévision à ce moment précis pour ne pas vous entendre, c’est là une marque ostensible d’irrespect que j’assume. Parce que vous manquez à tous vos devoirs et parce que vous ne respectez pas le Peuple de France.
Lorsque les caméras se seront retirées, lorsque vous vous retrouverez tout seul, ne sachant que faire pour occuper le silence qui suivra en cette triste soirée, Monsieur le Président, je vous invite à me lire ou à écouter « mon » allocution de fin d’année sur mon site herveferon.fr
Nous ne vous croyons pas, parce que vous avez menti. Et voici deux
exemples :
– L’an dernier, lors de vos vœux aux Français vous disiez « L’année 2018 sera celle de la cohésion ». Nous ne vous reprochons pas de ne pas y être parvenu, nous vous reprochons de ne jamais en avoir eu l’intention.
– Il y a trois semaines, sous la pression du Peuple en colère, vous annonciez une augmentation de 100€ sur le SMIC. C’était un mensonge et vous le saviez bien ! D’abord cessons de parler du SMIC en brut et de donner l’impression qu’un Smicard touche 1498€ par mois. Le Smicard, lui, ne connait que ce qu’il perçoit réellement, c’est à dire le salaire net et ce salaire net, Monsieur le Président, il est de 1184,93€ ! Ça, c’est le monde réel !!! Le SMIC n’augmentera, pas de 100€, il augmentera comme c’était prévu de 1,8%, c’est à dire qu’il passera de 1184€ à 1210€ ! Soit + 26€…
Je vous interpelle aujourd’hui parce que vous faites défaut à votre fonction en méprisant ainsi le Peuple.
Vous vous comportez comme un monarque, détournant ainsi tous les principes de la Constitution Française. Vous vous êtes même comparé à Jupiter (Dieu de la Terre, du Ciel et de tous les êtres vivants…) dans un moment d’égarement mégalomaniaque indigne de la fonction présidentielle, mais c’était là une première injure faite au Peuple. D’autres petites phrases ont suivi.
Le Roi, lui, avait des sujets et ses sujets lui devaient allégeance, cela s’appelle la monarchie. Le Président de la République, lui, doit être au service des Citoyens. Il doit les entendre, cela s’appelle la démocratie.
Vous exercez votre fonction tout autrement, vous décidez seul, sans véritable stratégie, mais avec obstination. Votre épouse qui n’a aucune légitimité pour cela, intervient sans cesse dans les affaires de la Nation, comme la Pompadour régnait auprès de Louis XV.
Vous le savez, vous avez été élu par une minorité de Français, 43,6% des électeurs inscrits seulement ont voté pour vous ! C’est à dire que 47 millions de Français n’ont pas voté pour vous ! Et parmi ces 43,6% d’électeurs, 43% ont déclaré voter pour vous, pour faire obstacle à Marine Le Pen.
Vous vous appuyez sur la majorité des votes exprimés, mais croyez-vous qu’il y a 50 ans les rédacteurs de la Constitution française avaient imaginé qu’un tel scénario pût être possible ? N’est-ce pas là un premier détournement de l’esprit de la Constitution, au sens par lequel Montesquieu traitait l’esprit des lois ?
Assis donc sur le trône triste de l’illégitimité, drapé de votre solitude amère, vous contemplez avec dédain le Peuple habillé de jaune qui vous crie sa colère, quand votre cote de popularité a pulvérisé tous les records en s’effondrant en dessous des 18%.
Ces gilets jaunes, vous tentez de les dissoudre, de vous en débarrasser. Vous prétextez les casseurs, les infiltrés de toutes sortes pour les décrédibiliser et brouiller leur message. Et puis, vous comptez sur l’usure du temps. À chaque acte, il nous est annoncé qu’ils sont moins nombreux. Et vous et vos Ministres, au fur et à mesure, vous faites dans la provocation, vous revenez immédiatement avec vos mesures insupportables et insupportées, vous décrétez l’Etat permanent de l’injustice sociale.
Je suis contre les violences, contre les dégradations, contre le blocage des petits et des gros commerces. Mais pas d’amalgame, les gilets jaunes, les vrais, ne sont que des gens pauvres qui n’en peuvent plus et qui vous crient leur misère. Ç’est ça la France aujourd’hui Monsieur le Président.
J’ai vu des retraités dans la rue, des femmes avec des enfants, des travailleurs pauvres, des gens inoffensifs que vous avez fait gazer, par l’envoi de grenades lacrymogènes, vous avez fait utiliser les flash Ball sur des Français non-violents, sous prétexte qu’ailleurs, à d’autres moments, il y avait eu des violences inadmissibles ! J’ai vu des femmes, des personnes âgées, les yeux rougis, verser des larmes dues autant au gaz lacrymogène qu’à la tristesse et au dépit. Vous avez fait tirer sur le Peuple. Prenez la Guerre des Farines de 1775, remplacez la farine par l’essence, Louis XVI par Emmanuel Macron et vous avez la Révolte des Gilets Jaunes de 2018-2019. Il n’y a pas de violence dans le mouvement des gilets jaunes qu’il faut considérer avec discernement, en responsabilité politique due par votre fonction. La seule violence, c’est celle que vous leur faite.
Vous êtes dans l’erreur Monsieur le Président.
Sur le fond, les Français sont très largement favorables aux gilets jaunes. Traquez-les, chassez-les, gazez-les, d’autres reviendront de partout, par les rues adjacentes. C’est inéluctable. « Ceux qui veulent éteindre les étoiles en feront toujours naître de nouvelles ! »
Que pouvez-vous faire ? Rendez au Peuple sa dignité, renoncez à votre culture de banquier des riches, rendez honneur à la Fonction Présidentielle. Liberté – Égalité – Fraternité.
Pour cela, vous avez des solutions possibles et si vous renonciez à votre entêtement, ce serait même assez simple :
– Remettez en place l’Impôt sur la Fortune immédiatement.
– Augmentez la TVA sur les produits de luxe à 30%. Croyez-vous vraiment que celui qui a les moyens de s’acheter une Ferrari à 200 000€ sera très gêné si elle lui coûte 20 000€ de plus ?
– diminuez la TVA a minima sur les produits de première nécessité, dont il faut allonger considérablement la liste en prenant en considération la dure réalité du quotidien des Français.
– Luttez contre l’évasion fiscale qui coûte chaque année à la France entre 60 et 80 Milliards. Donnez-vous les moyens, faites-en une priorité absolue, dénoncez l’Europe complice qui abrite en son sein des paradis fiscaux.
– Engagez-vous courageusement contre ce diktat de l’Europe qui contraint la France à emprunter aux banques privées et non à la Banque de France. Quand la dette publique frôle les 100% du PIB, vous surtaxez les français pour payer des intérêts aux banques privées. Le remboursement de ces intérêts est le 4ème poste budgétaire de l’Etat ! C’est à cela qu’il faut vous attaquer et non pas aux pauvres gens !
– En ces temps de populisme ambiant, il est raconté souvent n’importe quoi sur internet à propos des revenus des élus. Je pense que la plupart des élus travaillent beaucoup et sont honnêtes, il est tellement facile d’ironiser et de les suspecter systématiquement du contraire.
Ils méritent d’être bien indemnisés.
Mais je pense que les grands élus pourraient contribuer à l’effort national. 577 députés et 348 sénateurs. Je suis convaincu que s’ils diminuaient leurs indemnités de frais de mandat de 1000€ par mois, ils pourraient continuer à bien vivre et à bien fonctionner. Cela serait vécu comme un acte significatif de solidarité nationale. 925 Parlementaires multipliés par 1000€, multipliés par 12 mois, puis par 5 ans de mandat = 55 500 000€ d’économies.
Lorsque j’étais député, j’ai fait cette proposition qui n’a jamais été retenue, il m’a été conseillé fortement et de tous côtés de ne pas insister…
Mais imaginons qu’on étende cet effort de solidarité à vos Ministres, à vous-même, aux anciens Présidents de la République, à votre armée de conseillers, aux très hauts fonctionnaires et à tous les nantis de la République. Il s’agirait juste de faire un effort de contribution solidaire, il ne s’agit pas de vous mettre sur la paille… Mais les économies se compteraient par milliards.
=> Ainsi, vous pourriez trouver les recettes pour supprimer l’augmentation de la CSG sur les retraites. La retraite n’est pas une allocation sociale, elle est un dû, la diminuer est un acte anti républicain.
=> Vous pourriez aussi revaloriser de façon significative le SMIC. Pensez-vous qu’une personne qui touche le chômage ou même le RSA, ait intérêt à retrouver un travail au SMIC, c’est à dire précaire, en sachant qu’elle devra payer une nounou pour garder ses enfants, ou payer l’essence hors de prix pour aller travailler ? Il n’y a pas assez de différence entre les aides sociales et les bas salaires pour motiver les gens à accepter des emplois souvent pénibles. Car une des incohérences dans notre société est que les emplois les plus pénibles, les moins épanouissants, les moins valorisants sont souvent les plus mal payés.
=> Et puis avec ces recettes, vous pourrez donner le coût de pouce nécessaire aux employeurs des PME, PMI qui sont étranglés par les taxes et les procédures. Ce sont eux les premiers créateurs d’emplois et d’activité. C’est comme ça que vous relancerez l’économie, par la France d’en bas !
=> Avec ces recettes, vous pourrez aussi redonner des moyens aux services publics et garantir l’aménagement des territoires équilibré. Des moyens à l’offre de soin, aux hôpitaux publics, à l’Ecole de la République, aux bailleurs sociaux que vous étranglez, aux associations d’Education Populaire qui ont disparu par dizaines de milliers depuis le début de votre quinquennat, …
En République et vous devriez en être le garant, il est normal que le service public coûte cher, pour être de qualité et accessible à tous.
Ce ne sont pas des allocations, des primes, des compensations que demande le Peuple, c’est juste de la dignité. Pas de charité bien ordonnée, juste le respect des valeurs de la République et des Droits de l’Homme et du Citoyen.
=> Avec ces recettes, vous pourrez vous atteler à l’urgence climatique, mais pour cela il faut en avoir la volonté. Ne prenez-pas la planète en otage ! Surtout n’opposez pas l’indispensable nécessité de sauver la planète au minimum à vivre des Français.
Enfin, je suis Maire d’une petite Commune. Les Gouvernements successifs nous ont tout pris. Le pouvoir d’agir, en nous dépossédant de nos domaines de compétences et de nos responsabilités qui sont de plus en plus hyper-concentrés dans les mains des barons locaux Présidents de Métropoles, on a éloigné de nous les lieux de pouvoir avec les Grandes Régions, on nous diminue sans cesse les dotations indispensables pour des services publics de proximité.
Vous vous inscrivez dans cette continuité, vous méprisez les Maires en refusant leur invitation à leur Congrès National et vous diminuez leurs dotations, bien que vous affirmiez le contraire.
Ainsi les Maires ne sont plus que de simples gestionnaires, administrant leurs Communes sans la possibilité de faire vivre les Politiques Publiques. Là aussi, vous tentez de les décrédibiliser… On dira ensuite qu’il y a trop de Maires, trop de communes, trop d’employés municipaux…
Mais ces Maires sont le dernier bastion de cette République solidaire que nous appelons de nos vœux. Chaque jour, ils se battent, ils inventent des solutions pour secourir les plus pauvres et les plus démunis. Ils sont les garants de la cohésion sociale.
Ne les ignorez pas. Si les Maires de France n’avaient pas été là après les attentats du Bataclan, comment la France aurait-elle pu continuer à faire société, à vivre libre et en sécurité. C’est l’extraordinaire réseau des Maires qui a organisé sur tous les territoires la possibilité de continuer à vivre, par leur connaissance de la population, leur proximité sur le terrain. Sans eux, la moindre kermesse d’école, la moindre fête des voisins, la moindre rencontre sportive auraient dû être interdites.
Ils sont sans cesse dans la proximité, ils ont une expertise permanente de la réalité de la vie des habitants et de leurs difficultés. Ce fut une énorme erreur de supprimer totalement la présence des Maires à l’Assemblée. Ils sont les premiers représentants du Peuple.
Moi, comme Maire, je sais ce que ni vous, ni les députés ne savent. Je sais qu’aujourd’hui, il y a des familles, des chômeurs, des retraités, des travailleurs pauvres, des jeunes étudiants, qui font le choix de ne plus faire trois repas par jour, quand ils n’en ont plus les moyens ! Je ne vous dis pas là du Zola, je vous parle de scènes de la vie courante en 2018.
Alors, Monsieur le Président, redonnez-nous les moyens de cette indispensable solidarité, nous sommes là, en proximité auprès de tous les habitants sans exception dans nos Communes.
Le sujet n’est pas de redonner aux Français confiance en vous ou pas, le sujet est de leur redonner espoir, dignité et pouvoir d’achat.
À l’approche de ces 12 coups de minuit, je souhaite à toutes celles et à tous ceux qui m’auront entendu, en espérant naïvement que vous en serez Monsieur le président, une excellente année 2019.
Nous avons tous ensemble la République à reconstruire, des valeurs, la solidarité, le respect, les Droits et les Devoirs. Ainsi nous lutterons tous ensemble contre toutes les formes d’obscurantisme, contre les casseurs, contre le terrorisme, contre toutes les formes de violences physiques ou morales. Ce message Monsieur le Président n’est jamais qu’un message d’amour.
Pour une République à jamais solidaire Une et indivisible, une République Humaniste.