Evreux, 27 février 2013
Communiqué de Marc-Antoine JAMET
Premier secrétaire de la fédération de l’Eure du Parti socialiste
STEPHANE HESSEL ETAIT UN CAMARADE D’IDEAL
Stéphane Hessel était un militant. Etre né en 17 à Berlin, le Berlin de Spartakus, celui de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht assassinés et martyrs, prédestine. Il n’en tirait pas seulement un état-civil des plus romantiques. Il en reçut la conscience du siècle. Le retentissement de 14. Le tremblement de 17. La peur de 33. Le courage de 40. La douleur de 44. L’idéal de 46. Un siècle qu’il a traversé avec la même élégance, la même politesse, le même sourire, mais aussi la même malice, les mêmes clins d’œil et, dès qu’elle était nécessaire, la même impertinence. Témoin vivant d’une œuvre romanesque, il avait grandi sous le signe de la tolérance. Son enfance peu conventionnelle et libertaire auprès de Jules et Jim avait forgé son caractère épris de liberté, d’indulgence et de bienveillance.
Stéphane Hessel a toujours servi la France et ses valeurs, la paix et ses outils. Chaillot, Genève, New York : s’il était un soldat c’est celui des Droits de l’Homme, s’il était un serviteur c’était celui de René Cassin. Deux fois normalien et lauréat du Quai d’Orsay, il était, pour la Gauche, notre Romain Gary. Ils partageaient la Résistance, l’aviation, la diplomatie. La même fougue. Le même amour absolu d’une France qui ne les avait pas vu naître et qu’ils chérissaient. Mais il y avait davantage d’espoir chez Hessel ! L’espoir qui était son secret et son message. L’espoir qui fait rester éternellement jeune. L’espoir qui, même à 95 ans, fait ne jamais cesser de s’engager. Pour l’Europe, notamment, dont sa vie incarnait le combat.
Les socialistes ont perdu aujourd’hui un grand camarade. Un camarade d’idéal. Pour les 30 ans du 10 mai 1981, le hasard alphabétique nous avait fait signer ensemble, côte-à-côte parmi cinquante autres noms publiés dans le journal « Libération », à l’invitation de Paul Quilès, un appel au rassemblement des forces de la Gauche et de l’écologie. Un an avant le combat de 2012 – François Mitterrand qui l’avait fait ambassadeur de France ne lui était ni étranger ni inconnu – il passait ses consignes. Et il a poursuivi. Nous l’avions beaucoup vu lors de la campagne présidentielle entourer et accompagner François Hollande, du meeting d’investiture du candidat par les socialistes – c’était à la Halle Freyssinet – à la cérémonie de l’Hôtel de Ville de Paris. Autant que les larmes de Pierre Mendes-France dont il était l’ami, le jour de l’entrée en fonction du nouveau Président élu, 31 ans après, son émotion était humaine. Ce grand personnage ne se contentait pas de vivre les moments d’Histoire, il surprenait toujours, sans nostalgie, avec exigence, par sa modernité. Lors de notre dernier Congrès, Stéphane Hessel fut l’inspirateur d’une motion dont le titre lui ressemblait : « Oser. Plus loin, plus vite ! ». Les Congrès sont parfois un exercice prisé des jeunes loups. A 94 ans, il avait porté ses idées sur la tribune de Toulouse et rassemblé autour d’elles un nombre de voix qui avait créé la seule surprise d’un scrutin de lendemain de victoire présidentielle. Chapeau pour cette noblesse et ce panache.
Aujourd’hui, aucun Français, aucun citoyen européen, partageant la même tristesse, n’est pourtant orphelin de Stéphane Hessel. En 2010, en quelques pages, en quelques mots et trois euros, il nous avait tous légué son testament. Les socialistes, qui l’ont lu et l’ont retenu, qui étaient venus l’écouter dans l’Eure il y a quelques années à Val-de-Reuil, rendent hommage à sa mémoire. Comptez sur eux pour transmettre le flambeau.