Séance de mardi 28 juin 2011 :
Question du Député Hervé FERON :
« Monsieur le Président,
Ma question s’adresse à Madame la Secrétaire d’Etat auprès du Ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé, chargée de la Santé.
Ma démarche s’appuie sur un certain nombre d’études et de travaux réalisés par des scientifiques, ou des universitaires, ou des parlementaires.
Je ne prétends rien affirmer, mais je demande à ce qu’un travail de réflexion soit engagé immédiatement dans le cadre d’une politique de la santé ambitieuse en matière de prévention. Il me semble que les éléments sont assez démonstratifs pour qu’un véritable plan pluriannuel d’investissement soit engagé en ce sens.
En 2006, l’université de Southampton a publié une étude dans laquelle elle démontre les propriétés antimicrobiennes du cuivre. Des études similaires, menées au Chili, ont donné des résultats approchants, et d’autres expériences sont en cours en Allemagne, en Grèce, en Afrique du Sud et au Japon. Plus de 99% des principales bactéries, même très résistantes aux antibiotiques, meurent en moins de deux heures sur une surface cuivrée ou en alliage de cuivre.
Or, une grande partie des infections contractées dans les établissements de soins, dites nosocomiales, sont liées à ces bactéries qui se transmettent par contact, d’une surface quelconque à la main puis à la bouche, aux organes sexuels ou aux plaies. En France, plus de 4000 personnes en meurent chaque année, selon une estimation de l’office parlementaire d’évaluation des politiques de santé. C’est un peu plus que le nombre de tués sur les routes chaque année. En avril 2011, l’Institut de veille sanitaire affirme qu’en Europe, 5 à 10% des patients hospitalisés ont une ou plusieurs infections contractées lors de leur hospitalisation. Les propriétés microbicides du cuivre sont reconnues par les Etats-Unis depuis 2008
Le cuivre inactive le SARM, une forme de staphylocoque, en 90 minutes. Il inactive le virus de la grippe en quelques heures. Ce constat est à regarder, eu égard aux dépenses considérables que notre pays a engagé récemment pour lutter contre le virus de la grippe. Le cuivre réduit de 90 à 100% le nombre de germes pathogènes, selon l’enquête de Southampton. Il faut aussi considérer un rapport du Sénat sur les politiques de santé publique, qui estimait en 2006 entre 730 millions et 1,8 milliard d’euros par an le surcoût lié aux infections nosocomiales dans notre pays.
Une nouvelle piste de lutte contre les infections par le cuivre existe donc. Certes, elle a un coût. Le CIGMA de Laval (Centre Intergénérationnel Multi-Accueil), premier établissement en France à avoir expérimenté le cuivre, a dépensé 35 000 euros pour ses équipements novateurs.
Je vous propose, Madame la ministre, d’étudier un plan de prévention qui consisterait à remplacer progressivement tous les éléments métalliques des lits, des brancards, la robinetterie, les portes battantes, les poignées et clenches de portes, les rampes d’escaliers ou encore des stéthoscopes et cuvettes de toilettes dans tous les hôpitaux de France. Si l’on se fie aux coûts annuels avancés dans le rapport du Sénat en 2006 pour lutter contre les infections nosocomiales, il me semble qu’il y a là matière à générer des économies qui viendraient compenser progressivement la dépense engagée. Madame la ministre, je demande à ce que le gouvernement étudie très sérieusement cette proposition, et envisage de mettre en place un plan pluriannuel d’équipement en cuivre des matériels utilisés dans les hôpitaux, dans le cadre d’un projet qui pourrait être engagé lors de la prochaine loi de finances. »
Réponse de la Secrétaire d’Etat auprès de la Ministre des Solidarités, de la Cohésion Sociale, Madame Anne-Marie MONTCHAMP ; au nom de Madame Nora BERRA, Secrétaire d’Etat auprès du Ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé, chargée de la Santé :
« Merci Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Députés, Monsieur le Député Hervé FERON.
D’abord Monsieur le Député je vous prie d’excuser l’absence de ma collègue Nora BERRA qui m’a priée de vous apporter la réponse suivante.
Effectivement, le cuivre a des vertus antimicrobiennes et biocides qui sont à ce jour utilisées dans le domaine de l’agriculture et du traitement des eaux. Il est assez utilisé sous forme de sulfates de cuivre en viticulture, c’est ce qu’on appelle la bouillie bordelaise, ou encore sous forme de sels de cuivre comme traitement algicide de plans d’eau, ce qui n’est cependant pas recommandé à cause des risques de libération de cyanotoxines en présence de blooms de cyanobactéries.
Les alliages de cuivre possèdent également des propriétés biocides comme l’alliage cuivre-argent, utilisé dans le traitement de l’eau contre le développement des légionelles. Ce principe du traitement de l’eau est utilisé dans certains pays européens, le cuivre faisant partie des substances biocides de la liste communautaire. Si de tels usages antimicrobiens du cuivre par contact direct sont connus, les mécanismes de cette action ne sont pas pleinement élucidés et participent probablement de plusieurs actions.
Comme vous l’indiquez, Monsieur le Député Hervé FERON, les alliages de cuivre qui pourraient présenter de telles propriétés antimicrobiennes sont étudiés dans quelques pays pour l’intérêt que pourraient apporter des surfaces de contact en cuivre dans la lutte contre les infections en milieu de soins, ce que vous avez illustré dans votre question.
Néanmoins, l’action du cuivre sur la réduction des bactéries sur certaines surfaces de l’environnement des malades ne peut être traduite directement sur le plan clinique par une diminution des infections associées aux soins. Une validation de cette hypothèse nécessite des programmes d’évaluation rigoureux conduits selon des protocoles étayés sur le plan scientifique. A ce jour, les expériences sont encore très limitées et les résultats ne sont pas encore totalement probants.
De plus, vous comprendrez, Monsieur le Député, que seule une évaluation poussée de ces propriétés sera garante de l’innocuité de l’exposition des patients à ces alliages par ailleurs. Mais vous pouvez être assuré que le Ministère de la Santé restera vigilant à toutes les nouvelles données scientifiques à ce sujet. »
Réaction de Monsieur le Député Hervé FERON :
« Madame la Ministre, je vous remercie pour votre attention et votre réponse. Simplement, ce ne sont pas quelques pays qui ont travaillé. Les pays sont nombreux, la liste que je vous ai énumérée le montre. Les évaluations commencent à s’accumuler et je pense que si ma demande est entendue, le gouvernement ne devrait pas tarder à travailler, à s’emparer de ces évaluations pour en tirer toutes les conclusions qui sont nécessaires et qui peuvent nous être très utiles. »