Par deux Questions Ecrites que vous pouvez retrouver dans leur intégralité ci-dessous, Hervé FERON interroge le Premier ministre sur le bilan du plan « priorité jeunesse », trois ans après sa mise en place et le Ministre de l’Intérieur sur la situation des personnes étrangères en situation d’enfermement dans les Centres et Locaux de Rétention Administrative (CRA et LRA).

  1. Le bilan du plan « priorité jeunesse », trois ans après

Monsieur Hervé Féron attire l’attention de M. le Premier Ministre sur les conditions de vie des jeunes aujourd’hui. Réuni le 3 juillet dernier, le troisième Comité interministériel de la jeunesse a été l’occasion de revenir sur l’ensemble des mesures mises en place depuis le début du quinquennat de François Hollande pour faciliter la vie des jeunes à tous les niveaux.  Nouveaux échelons de bourses étudiantes, développement du service civique, mise en place de la garantie jeunes, accès pour un million de jeunes à la future prime d’activité, droit au retour à la formation jusqu’à 25 ans, gel du montant des droits inscriptions à la rentrée universitaire 2016… Les mesures sont nombreuses, et prouvent que depuis trois ans, la jeunesse est l’une des priorités du Gouvernement. Malgré tout, la situation de cette population ne s’améliore guère, et l’engagement phare de François Hollande pendant sa campagne pour que « les jeunes vivent mieux en 2017 qu’en 2012 » est encore loin d’être tenu. Le Premier Ministre l’a reconnu lui-même le 3 juillet dernier : « beaucoup reste à faire ». Les organisations de la plateforme « Big Bang », composée d’organisations de jeunes, d’éducation populaire et d’insertion, dressent en effet un triste bilan de la situation des jeunes : à l’heure actuelle, 23% d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté en France. Parmi les 18 – 34 ans résidant toujours chez leurs parents, 50% ont un emploi précaire, contre 36 % en moyenne dans l’Union européenne. Entre 1,5 et 1,9 million de jeunes sont ce qu’on appelle des « NEET », c’est-à-dire qu’ils ne sont ni en emploi, ni en formation, ni scolarisés en France ; 140 000 jeunes sortent d’ailleurs du système scolaire chaque année sans diplôme. Les jeunes consacrent 18,7 % de leurs ressources à se loger, contre 10 % pour l’ensemble de la population. Pour sortir de cette situation catastrophique pour beaucoup de jeunes, de plus en plus nombreux à voir leurs conditions de vie se dégrader, la plateforme « Big Bang » formule plusieurs propositions. En particulier, elle demande la mise en place d’une politique publique transversale et coordonnée en faveur de la jeunesse, plutôt qu’un  empilement de dispositifs, ciblés sur l’âge ou encore le lieu d’habitation, « jamais sur les parcours ». Ce constat est partagé par le Conseil économique, social et environnemental, qui publiait en mars 2015 un rapport dont certaines propositions retiennent particulièrement l’attention. Le CESE préconisait ainsi de faire en sorte que  la garantie jeunes, mise en place en 2013 et qui a depuis fait ses preuves (48 % des jeunes qui en ont bénéficié ont trouvé un emploi après un an !) ne soit plus un dispositif spécifique, mais un véritable droit. Une autre proposition consistait à simplifier l’accès à la Couverture Maladie Universelle – Complémentaire (CMU-C) et à l’Aide au paiement d’une Complémentaire Santé (ACS) pour cette population, car aujourd’hui près de 30 % des jeunes déclarent renoncer à des soins pour des raisons financières. M. Hervé Féron, qui juge ces propositions très pertinentes, souhaiterait connaître l’avis de M. le Premier Ministre à leur sujet. Plus largement, il voudrait savoir quelles sont les pistes du Gouvernement pour faire du plan priorité jeunesse un véritable projet de société, ambitieux et transversal, dans lequel la totalité des jeunes pourraient s’inscrire.

2.      La situation dans les Centres et Locaux de Rétention Administrative (CRA et LRA)

M. Hervé Féron attire l’attention de M. le Ministre de l’Intérieur sur les étrangers en situation d’enfermement dans les Centres et Locaux de Rétention Administrative (CRA et LRA). Lors de la campagne présidentielle de 2012 et à travers une lettre envoyée à France Terre d’Asile, M. le Président de la République avait fait la promesse que la « rétention [redeviendrait] l’exception et non la norme ». Cet engagement avait été pris en réponse à la promulgation de la Loi Besson de 2011 et à la croissance conséquente du nombre de placements dans les CRA et LRA. Malgré cela, la France demeure aujourd’hui le malheureux champion d’Europe de l’enfermement des migrants, loin devant l’Allemagne, l’Espagne ou le Royaume-Uni. En outre, cette pratique reste en constante augmentation. Ainsi, en 2014, son utilisation a été accrue de plus de 9% sur l’ensemble du territoire, et de plus de 22% en Outre-mer.  Du fait de cette massification, les conditions de rétention ont empiré et les migrants éprouvent de plus en plus de difficultés à accéder aux droits qui leur sont pourtant légitimes. A titre d’exemple, à Mayotte, trois-quarts des migrants illégaux ne bénéficient pas d’un contrôle juridictionnel lors de leur détention. De manière encore plus choquante, et ce malgré la condamnation de 2012 de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, l’enfermement des mineurs dans les centres de rétention est toujours pratiqué et il est même en augmentation par rapport à l’année dernière. Ainsi, en 2014, 5 692 mineurs ont été enfermés, de manière totalement illégale, dont 5 582 à Mayotte. L’on s’aperçoit ainsi de l’urgence de la situation dans les Outremers et particulièrement à Mayotte, même s’il ne faut pas oublier que 110 mineurs ont été illégalement placés dans les centres métropolitains. Enfin, le rapport de 2014 des cinq associations intervenant dans les CRA et LRA dénonce une utilisation abusive et détournée de de ces centres. En effet, le placement est aujourd’hui utilisé par les préfectures comme outil de dispersion des migrants suite au démantèlement d’un camp illégal. Face à une telle massification, à la dégradation des conditions de détention et au recours abusif à l’enfermement dans les CRA et LRA, M. Hervé Féron souhaiterait savoir si des mesures correctives sont prévues par le Gouvernement, et si celles-ci ne pourraient pas trouver leur place au sein du Projet de Loi relatif au droit des étrangers.